Les récentes déclarations de Ségolène Royal (lues ici) me font bien plus froid dans le dos que les supposées intentions eugéno-facho de Sarko : "Les prédateurs, les violeurs et les abuseurs savent parfaitement ce
qu'ils font. A ce titre, ils doivent être poursuivis et condamnés" .
Elle nous prépare une alliance avec le FN, qui prône (ou prônait) la peine de mort pour les violeurs d'enfants? Doulce France présidente...
Je poste donc maintenant une partie d'un billet que j'avais laissé en jachère à l'époque de l'interview de Sarko par Onfray (une partie seulement, car Koz en a entre-temps pondu un excellent), complété de la confirmation des pistes que j'évoque par Philippe Froguel -professeur de médecine génomique et directeur de recherche en génétique au CNRS- dans un article intitulé "Génétique, sexe et psychiatrie, arrêtons les procès en diabolisation".
Je reprends sa conclusion,qui confirme mon propos, avant de revenir sur ses arguments rationnels et les apports de la science génomique au sujet :
"Je suis plutôt reconnaissant du fait qu'un candidat à la présidence ait osé s'intéresser à ces problèmes complexes de l'inné et de l'acquis et à leurs conséquences sur la santé d'une manière finalement si humaine. Les personnes que je connais qui souffrent, car elles sont impuissantes à aider leurs proches [...], ont forcément un jugement moins tranchant sur ces questions que les donneurs de leçons du bien-penser. La réalité est complexe." Je crois que Verel serait d'accord.
"Arrêtons de juger sommairement et de diaboliser ceux qui osent s'interroger un peu de travers sur les mystères de la vie et de la maladie au risque de transformer les Français en moutons de Panurge lobotomisés. Et, surtout, n'utilisons pas la science et la maladie à des fins politicardes : les accusations de nazisme des pourfendeurs du "tout-génétique" sont ridicules et ne sont pas dignes des débats de l'heure."
En est-on arrivé à prétendre que tout est social, rien n'est hérité? Ce qui marche
pour les maladies physiques (prédispositions au cancer, par exemple) ne
fonctionnerait jamais, par essence, pour le psychisme?
Cette volonté de rendre l'humain responsable de tout et ce refus d'envisager le jeu du hasard, la mauvaise fortune,
sont porteurs de graves conséquences. Comme quand il faut absolument un
coupable à la défaillance technique d'un moyen de transport ayant causé
un accident mortel...
Ceux qui s'excitent sur cette déclaration, pourtant pas toujours des pucelles effarouchées,
devraient réfléchir au raisonnement inverse : le pédophile est
responsable?
S'il ne l'est pas, la psychanalyse est la panacée? Soyons
sérieux, les pédophiles ne guérissent pas toujours, loin s'en faut, par le "simple" travail sur soi. La castration
chimique est souvent considérée comme le seul moyen de les empêcher de
se laisser emporter par leur vice. Est-ce pour autant fascisant?
Par ailleurs, je salue avec force le fait que Sarko cherche à déculpabiliser les entourages lorsqu'il dit que les parents ne sont pas responsables du suicide de leur enfants. Ca, c'est de la compassion ! Certainement socialement -et pour les intéressés- plus utile que des considérations sur le déterminisme de l'entourage...
Surtout que, dans le Monde de cet après-midi, Philippe Froguel -professeur de médecine génomique et directeur de recherche en génétique au CNRS- dans un article intitulé "Génétique, sexe et psychiatrie, arrêtons les procès en diabolisation" confirme tout le bien (ou, à tout le moins, le bénéfice du doute) que je pensais du propos de Sarko. Morceaux choisis :
- "Pour des raisons génétiques (mutations de l'ADN par exemple) ou
épigénétiques (anomalie du fonctionnement des gènes survenant durant la
vie foetale), nous naissons hélas inégaux : certains ont des anomalies
du développement tellement visibles qu'on les détecte dès la naissance.
Tous les autres ont des caractéristiques génétiques qui les rendent
plus ou moins vulnérables aux maladies.
Ces maladies de civilisation [obèsité, diabète, cancer] sont donc à la fois 100 % génétiques et 100 % environnementales.Sait-on, par exemple, que les malades victimes de la version humaine de la "maladie de la vache folle" ont reçu une mutation du gène du prion venant de leurs deux parents ? Sans la folie des éleveurs britanniques, aucun ne serait cependant devenu malade mais ils avaient tous une "fragilité" potentielle génétique qui a rendu possible la maladie de Creuzfeld-Jacob." - "Les maladies psychiatriques n'échappent pas au lot commun. Que cela
plaise ou non, la dépression est un trait en partie génétique et des
gènes de prédisposition ont bien été identifiés chez l'homme et
l'animal. Les familles de déprimés existent et si l'on dépistait mieux
leur trouble et suivait leurs enfants, moins d'adolescents se
suicideraient."
- "Ce qu'a dit Nicolas Sarkozy sur la dépression ne me choque donc pas,
car il faut arrêter de culpabiliser les enfants déprimés et leurs
familles, en niant le caractère biologique endogène de leur trouble. Il
s'agit au contraire de les aider, et si la science génétique peut
permettre de trouver les "causes" de leur maladie, peut-être
pourra-t-on un jour la guérir !"
- "La même chose est vraie pour nombre d'addictions (drogues, et même
alcool, cigarette et dépendance alimentaire), qui sont nettement
favorisées par certains de nos gènes exprimés dans notre cerveau. Le
dire signifie-t-il que l'on veuille supprimer avant la naissance tous
les consommateurs potentiels de plaisirs artificiels ? Ou plutôt que
l'on cherche à mieux les aider ?"
- "a science a établi que la personnalité humaine a plusieurs facettes, dont certaines sont très héréditaires. Mais, sur ce fond génétique, l'environnement, l'éducation, la culture et le libre arbitre vont contribuer ensemble à faire d'un jeune homme aimant un peu plus que les autres l'innovation et la prise de risque un futur délinquant drogué ou un Picasso ou un Einstein."
"La question des comportements sexuels est plus compliquée [...]. On peut rendre homosexuels des rongeurs en modifiant un gène [...]. On ne naît pas prédestiné à la pédophilie, mais si on oblige ces délinquants à des traitements médicamenteux au long cours c'est qu'ils ont peut-être une "maladie" organique chronique qui ferait intervenir l'inné et l'acquis dans son développement, comme toutes les autres."
Un paquet de monde a perdu une bonne occasion de se taire. Il y a suffisamment d'arguments politiques contre Sarko pour laisser tomber le terrain des fantasmes et de la Résistance de pacotille.
je viens de lire l'article en lien, et je trouve que tu vas un peu vite car je n'y ai pas lu Ségolène préconiser la peine de mort pour les pédophiles ... ton froid dans le dos doit plutôt être dû à de la fièvre (sarkosiste ?) elle même dûe à une infection (généralisée ?).
Dans ton article tu passes du tout ou rien, si la pédophilie n'est pas à 100% innée elle est à 100% aquise ?? Il ne me semble pas que Ségolène ait dit ça ...
J'ai compris (mais peut-être mal ...) qu'elle préconisait juste que les déviants sexuels soient surveillés et remis en liberté sous certaines conditions : pour ma part ça ne me fait pas froid dans le dos contrairement à la théorie eugéniste de sarko !!
Car si la pédophilie, comme le suicide, sont totalement d'origine génétique cela signifie que tout est joué et rien ne pourras être modifié, et du coup on peut laisser tomber tout le système social (assistantes, psychologues ...) vu qu'il ne sert à rien !!
D'une part, il n'ya pas de preuve scientifique de ce qu'il avance, et c'est très grave d'affirmer cela quand on sait toutes les déviances que ça peut impliquer (à l'époque on castrait "physiquement" les "fous" au nom de l'eugénisme).
Pour la première fois je te trouve brouillon et je ne comprend pas quel est ton discour si ce n'est en simplifiant : royal-mal, sarkosy-bien.
Exemple: je te cite "Cette volonté de rendre l'humain responsable de tout et ce refus d'envisager le jeu du hasard, la mauvaise fortune, sont porteurs de graves conséquences." il me semble que le discour de sarko est bien plus proche de ça que celui de sego ... sauf que chez sarko ce serait plutôt : tes gènes sont responsables de tout et la mauvaise comme la bonne fortune ne comptent pas ...
Et puis un dernier truc : que vient faire la psychanalyse dans tout ça ???
Rédigé par : Hélène | 18/04/2007 à 11:08
J'avoue, j'exagère la position de Royal. Mais prétendre les violeurs etc. forcément responsables, c'est de la démagogie crasse et archi dangereuse; dans le style qui, si on pousse le raisonnement, peut aboutir à la peine de mort.
Les opposants à Sarko ne se sont pas privés de dire qu'il prônait l'eugénisme, hein. Pourtant, Hélène, il n'a rien affirmé : il s'est contenté d'un "pour ma part, j'incline à penser que"...
Je parlais du hasard en pensant à la "qualité" de nos gênes : on n'y pourrait rien d'avoir en nous certaines pathologies innées.
Précisément, comme l'écrivait Verel dans un billet à ce sujet, je crois qu'il y a de l'inné et de l'acquis, que la réalité est (hélas pour nos cerveaux en quête de vérités absolues) nuancée, grise. Voilà pourquoi l'hystérie qui a suivi cette phrase de Sarko était souvent intellectuellement très malhonnête. Il n'y a pas, je crois comme toi, de 100% acquis ni de 100% inné.
Il n'y a aucune preuve non plus que ces pathologies mentales sont à 100% acquises, Hélène...
Sarko a "juste" dit qu'il considérait plutôt innées certaines déviances ou pathologies mentales ; même si cette inclinaison me semble oublier combien les traumatismes enfantins sont déterminants, je trouve bon qu'il ait osé penser un peu différemment du modernisme qui considère que l'homme (ou son contexte social : son entourage) est absolument responsable de tout ce qui lui arrive ; déculpabiliser l'entourage me semble éminemment louable.
J'évoquais la psychanalyse car si on considère que c'est l'entourage, le contexte (le surmoi) qui conditionne tout ce que nous sommes, seule la psychanalyse peut agir sur nos maux en nous distanciant de notre contexte. Non?
Un délinquant sexuel condamné purge sa peine et devra quand même, après, porter le bracelet électronique...et c'est Sarko le facho qui stigmatise et prépare une société du fichage ?!
Bref, je voulais juste apporter ma pierre à la nuance, contre les hurlements indignés que cette phrase de Sarko n'aurait pas du provoquer.
Rédigé par : Charles | 18/04/2007 à 12:30
Ouf, le brevet de Sarkozisme ne t'echappera pas. Tu as trouvé le ''seul'' scientifique à avoir plus ou moins defendu Sarko dans cette affaire. C'est vrai que tous les autres sont des gauchistes comme Axel Kahn... Ce n'est vraiment pas sérieux.
Rédigé par : petit jardin | 19/04/2007 à 01:42
Pour être plus précis je te recommande de consulter les avis des scientifiques et médecins qui ont manifesté leur inquiétude ou leur indignation après les propos de N. Sarkozy :
Axel Kahn, directeur de l'Institut Cochin
Jean-Claude Ameisen, président du comité d'éthique de l'Inserm et membre du Comité consultatif national d'éthique.
Jacques Testart, directeur de recherches à l'Inserm
Bertrand Jordan, fondateur de la Génopole de Marseille
Christine Bellas-Cabane, présidente du Syndicat national des médecins de la protection maternelle et infantile (SNMPMI)
Pr Gérard Schmidt, président du Collège de pédopsychiatrie
Pr Bernard Golse pédopsychiatre de l’Hôpital Necker -Enfants malades.
Etc, etc..
Rédigé par : petit jardin | 19/04/2007 à 02:21
J'ai déjà lu un certain nombre de ces avis.
Je voulais juste dire que les choses n'étaient pas aussi tranchées que certains l'ont affirmé. Une simple "inclinaison à penser" n'équivaut pas à la certitude de l'horreur eugéniste.
Surtout que le professeur que je cite montre qu'il n'est absolument pas exclu que les gènes aient un rapport avec les comportements cités.
Mon article n'équivaut pas, par ailleurs, à un acquiescement au feu projet Sarko de déctecter dès 3 ans les "troubles du comportement", hein. C'est un autre sujet.
Rédigé par : Charles | 19/04/2007 à 10:34
Mais à propos de brevet, petit jardin, ça ne te fait rien que Royal dise que "les prédateurs, les violeurs et les abuseurs savent parfaitement ce qu'ils font" ?
Rédigé par : Charles | 19/04/2007 à 17:21
Comme je l'ai déjà exprimé sur le blog de Toréador, ce sujet est, à a mon sens, un sujet purement philosophique dans laquelle un homme politique n'a pas a s'aventurer, ou, tout du moins, pas dans un journal magazine.
Par définition les idées philosophiques sont contestables et contestées. Exemple, je suis persuadé que l'homme est un produit social, or, si je suis homme politique, va t-on me reprocher de penser que nous sommes tous les même ? que je met tout le monde dans le même panier ? que je suis l'auteur d'un horrible quiproquo ? Le principe des sondages est d'ailleurs fondé sur cette théorie non ? Sinon comment projeter l'avis d'un échantillon sur une population entière ?
Soyons sérieu et cartésien un instant. il n'y a pas de vérité pure, la philosophie n'est pas les maths. L'erreur de NS fut qu'il voulu, encore une fois (une fois de trop cette fois ci) faire parler de lui au nom de l'ouverture de débats..
Salutations
http://careagit.blogspot.com
Rédigé par : Seb | 20/04/2007 à 16:53
Erreur? A voir, le corps électoral ne se résume pas à certaines sphères parisiennes.
Les idées philosophiques sont effectivement aussi peu "falsifiables" que les idées politiques. Encore moins même.
Mais les idées politiques sont contestables. Doit-on en conclure qu'on ne doit pas en exprimer dans une campagne?!!!
Et puis dans une campagne présidentielle, où beaucoup se joue sur les valeurs du candidat, exprimer des aspirations philosophiques est loin d'être incongrue.
En +, l'article de Froguel montre que sur le terrain scientifique (falsifiable), Sarko n'a pas dit d'énormités dont l'invalidité aurait été démontrée.
Rédigé par : Charles | 20/04/2007 à 17:02
Post pitoyable.
Et vous vouliez changer la France, vous n'êtes devenu qu'un (tout petit)suppôt de l'UMP.
Prochaine étape le FN ?
Rédigé par : republique | 21/04/2007 à 12:31
J'aimerais beaucoup échanger avec vous sur l'inné et l'acquis, l'état des connaissances en génétique, le déterminisme...
Rédigé par : Charles | 21/04/2007 à 21:07
Coucou.
En ce qui concerne les gènes :
un gène, pour ce que l'on en sait, sert à coder une protéine.
une mutation entraîne un changement dans le codage de cette protéine qui devient soit inopérante, soit fait son boulot de manière un peu différente.
Selon la fonction de cette protéine, le résultat peut être des yeux bleus ou la mort après quelques semaines de tentative de vie.
Il n'y a pas donc pas de gène de l'obésité. Il y a par contre des tas de gène qui codent des protéines qui transforment les acides gras en sucre ou des trucs dans le genre, et qui quand ils deviennent inopérants, peuvent entraîner l'obésité.
Donc, les gènes agissent sur la chimie et pas sur les notions : c'est nous qui interprétons (souvent à tort et à travers) le sens des gènes.
Il est vrai que la dépression peut avoir une origine génétique, mais la dépression est une maladie relativement bien identifiée. Ce n'est pas le cas de la pédophilie : un type déséquilibré (peut-être pour des raisons génétiques) se focalise sur les enfants pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la génétique. Et certains pédophiles savent très bien ce qu'ils font, quand ils partent faire du tourisme sexuel ici ou là : je ne suis pas sûr que la génétique a quelquechose à voir avec ceux-là.
La honte, la culpabilité, le désir, correspondent à des mécanismes chimiques dans le cerveau qui existent grâce à des schémas génétiques préétablis ? Oui pourquoi pas, mais ce qui va faire qu'on associe à tel ou tel événement tel ou tel sentiment, ce n'est pas la génétique, c'est son histoire personnelle.
La grande force du vivant, c'est justement la complémentarité entre atavisme et plasticité (hohoho) : le plus grand héritage de nos parents, c'est notre immense capacité à nous adapter.
D'ailleurs je crois que l'autre Charles devrait commencer à se douter de qui se cache derrière ce pseudonyme fort bien adapté au sujet.
Survival of the fittest ? modèle économique et théorie de l'évolution, un mariage dangereux...
Rédigé par : Charles Darwin | 27/04/2007 à 15:56
Jo Darwin,
L'exemple de la dépression est utilisé précisément pour montrer que, puisque cette pathologie mentale a des causes génétiques, rien ne peut exclure que des prédispositions génétiques à la pédophilie puissent exister.
Il est en tous cas, comme tu l'écrit, évident que ce sont les traumatismes vécus qui, au moins, la déclenchent.
Mais voilà : tout le monde s'effraie, crie à l'absurdité scientifique alors que rien ne prouve, bien au contraire, que ce propos précis de Sarko soit une insulte aux connaissances actuelles de la science. On peut raffiner, mais la position inverse (tout est issu du contexte social, en gros) n'est pas forcément plus généreuse.
Moi ce que je vois finalement de bon (je suis peut-être naïf), c'est que Sarko ait insinué que les hommes n'étaient peut-être pas tout-puissants.
Bref. J'ai voulu m'insurger contre la levée de boucliers bien-pensants qui hurlaient à l'eugénisme quand Sarko, dans une discussion à bâtons rompus, a juste dit "j'incline à penser que".
Quand on voit que Royal, par démagogie, dit que les pédophiles sont responsables et que, au contraire, Sarko veut déculpabiliser l'entourage des malades mentaux, je trouve que le manichéisme n'est pas forcément à l'avantage de la personne qu'on croit.
Je soutiens Sarko parce qu'il veut agir sur les points précis qui ont enfoncé notre pays dans le marasme. Pas pour ses inclinaisons philosophiques.
Un contrat de gouvernement pour des missions précises, pour que la France renoue avec le dynamisme. Voilà ce qu'il faut, voilà ce que je veux.
Rédigé par : Charles | 27/04/2007 à 16:09