C'est le titre d'une interview de Christian Blanc, publiée hier par Metro. Puisque Jérôme évoquait hier le scenario (blanc!) d'une France recomposée et débarassée du chômage, voilà des propos qui montrent que tout est possible si on accepte, au préalable, de regarder la réalité en face et de la présenter sans détours aux Français. Alors, un nouveau modèle d'organisation économique, territoriale, administrative et politique, devra leur être proposé dans un projet global et cohérent.
"La situation de l’économie française vous parait préoccupante ?
Le défaut de croissance, qui dure depuis 20 ans, freine tout développement économique et social. L’impôt sur le revenu ne sert plus qu’à rembourser les intérêts de la dette. C’est le second poste budgétaire français. Jamais depuis la seconde guerre mondiale nous n’avons connu une telle situation! […] Le modèle économique français est mort.
Vous proposez une "méthode Blanc" pour y remédier…
On ne peut pas vivre avec une certaine idée de la France qui ne correspond plus à la réalité. [...] Dans cette France en chute libre, le choix de l’économie de l’innovation s’impose. […] C’est une économie de réactivité dans laquelle ces acteurs ont besoin d’être en contact et de s’accorder une confiance réciproque. Les régions sont pour cela l’échelon le plus adapté. Il est nécessaire d’en finir avec l’organisation jacobine à la française.
Les candidats à la présidentielle vous entendent-ils?
Nicolas Sarkozy a lu mon livre. S’il reste à savoir quelle en sera sa traduction, il est celui qui a donné le plus d’éléments sur sa stratégie. En se fondant sur les dépenses, le programme socialiste a 30 ans d’âge avant de naître. J’espère néanmoins que Ségolène Royal exprimera ses idées sur la régionalisation de l’économie. Pour le moment, François Bayrou n’est encore que dans un positionnement. Mais je leur mettrai une pression terrible. Parce que si ces questions ne sont pas au cœur de la campagne, cela finira par une exclusion sociale généralisée."
[L'intégralité de l'interview ici.]
L'évolution du PIB français (cf graph ci-contre) est à elle seule une preuve de notre déclin, absolu comme relatif. Ce n'est pas une question de prestige ou de concours du pays qui aura le plus grand nombre de milliardaires car, comme l'écrit éconoclaste : "Non seulement la stagnation économique a des conséquences sociales très dommageables, mais
l'Europe va bientôt être confrontée au vieillissement de la population
et à la croissance des dépenses de santé qui seront difficiles à
supporter avec une croissance économique trop faible". Puisque c'est la connaissance et l'innovation qui sont les nouveaux moteurs de la croissance des pays développés, prenons en acte et organisons-nous en conséquence !
L'organisation (ultra-centralisée + millefeuille administratif) de notre Etat, outre qu'elle ne fait plus la preuve de son efficacité (cf la dette vs nos performances de croissance, de chômage et d'intégration), est un frein absolu à notre entrée dans l'ère de l'innovation. Elle doit donc être revue en profondeur pour valoriser nos potentiels.
La voix de Christian Blanc, qui pose un diagnostic sans concession tout en proposant des voies à même de nous faire réellement sortir de l'ornière, doit être entendue pour que cette élection ne nous amène pas un(e) nouveau(/elle) Chirac (/raque!). Rien de plus simple.
Je souhaiterais quelques explications sur ces lignes extraites du lien donné dans ton article :
"Dans l’éducation, la définition des programmes du primaire et la formation des maîtres resteront des responsabilités de l’Etat, mais tout le reste –recrutement des enseignants, organisation des cours et des examens,gestion des personnels et des infrastructures…– sera décidé au niveau de la région, de la commune, voire de l’établissement ".
C'est sidérant ce programme ! Ça ne veut rien dire, dit comme ça.
Concrètement je voudrais que tu m'expliques comment se déciderait le recrutement des "enseignants" (au passage, j'aimerais qu'on m'explique pourquoi le mot "professeur" n'est plus jamais utilisé). Et quid de l'organisation des examens ? Plus d'examen national ? Hum...
Puisque tu as l'air d'aimer les propositions concrètes (cf. article sur Bayrou), voilà l'occasion de discuter.
Rédigé par : charlotte | 07/12/2006 à 19:22
Pourquoi les régions ou les établissements eux-mêmes (carrément) ne pourraient-ils pas recruter eux-mêmes les enseignants? Ce recrutement se déciderait comme il se décide dans toute entité autonome.
Le programme des examens pourrait être national mais l'organisation des examens relever de la compétence régionale. Quelle obligation y a-t-il, du moment que les examens nationaux (si Energies2007 ne prend pas position sur un sujet aussi précis aujourd'hui, j'estime personnellement que des examens nationaux doivent subsister) sont organisés le même jour, que l'Etat central décide de tous les détails de leurs modalités précises?
Si le passage que tu cites mériterait d'être précisé, je ne saisis pas vraiment ce qui te choque fondamentalement.
Rédigé par : Charles André | 11/12/2006 à 10:48
Pour le moment, il y a deux types de professeurs dans les établissements publics : les uns sont recrutés localement, pour des contrats à durée déterminée ; ils coûtent peu cher et ont des conditions de travail plus difficiles ; ils sont moins diplômés ; les autres ont réussi un concours leur donnant le statut de fonctionnaires ; ils ont la garantie d'être payés, qu'ils soient affectés à un poste ou non.
Toucher à ce système, c'est remettre en cause cette assurance d'un emploi ; si le professeur est embauché par l'établissement, il faudra qu'il cherche lui-même son poste et donc, nécessairement, ne pas être payé s'il n'en trouve pas. Ça soulève un vrai problème, mais c'est utile d'en parler car il est vrai qu'actuellement certains sont payés à ne rien faire.
Cela soulève aussi la question des critères de recrutement, mais aussi des statuts : un bon professeur (dans la pratique, indépendamment du diplôme) pourrait-il négocier son salaire ? Mais comment juger d'un bon ou mauvais professeur ? La tentation en serait-elle pas de recruter des profs moins chers donc moins qualifiés (c'est déjà un peu la tentation des gouvernements qui, par exemple, limitent le nombre de postes des concours) alors qu'il est évident que si les profs gagnaient plus, le niveau général serait meilleur car la profession attirerait des personnes talentueuses (et au passage nous serions moins traités de larbins par les élèves et leurs parents qui savent bien que nous gagnons peu, et qui attendent que leurs enfants fassent "quand même mieux que prof de maths !" Note du rédacteur en colère !)
Cela risquerait aussi de causer un manque de profs dans les campagnes et dans les quartiers difficiles et une forte demande dans les grandes villes du sud par exemple. Le recrtuement national permet précisément que tous les établissements aient des professeurs qualifiés. Si le recrutement était régional, comme c'est le cas pour les professeurs des écoles, le concours serait régional, donc plus dur dans les régions très convoitées, ce qui est fondamentalement injuste.
L'organisation des cours : cela signifie quoi ? Le nombre d'heures d'enseignement d'une matière par niveau par exemple ? Le nombre d'élèves par classe ? Quoi ?
Cela signifie que d'un collège à l'autre il n'y aurait plus le même programme ? Pas la même répartition des heures de cours ?
Pour le moment on a le même programme, des horaires dits "planchers" çad mimimum mais c'est organisé par le conseil d'administration qui répartit les sous qu'on lui donne en nombre d'heures de cours, donc de classes et d'élèves par classe. Que compte changer là Energie 2007 ? Je ne comprends pas.
Tu comprends bien qu'on ne peut pas passer vite fait sur ce genre de questions en disant en gros "faut faire ci ou ça". Si c'était simple, il n'y aurait pas de grèves à chaque réforme.
Si Energie 2007 veut être crédible, il faut qu'elle le prouve sur des questions aussi concrètes et urgentes que celles-là qui intéressent tous les citoyens.
C'est quoi l'idée de Energie 2007, c'est créer des écoles hors-contrat ou quoi ?
Rédigé par : charlotte | 12/12/2006 à 09:31
Pour comprendre l'idée de régionalisation de l'enseignement, il faut lire le rapport de Christian Blanc qui a été à l'origine des pôles de compétitivité. Son apport essentiel a été de prouver que la croissance ne procédait pas seulement - et même plus beaucoup - de politiques macroéconomiques, mais du dynamisme des territoires, et de leur capacité à créer de la richesse en associant enseignement supérieur, recherche et tissu industriel.
L'idée est très bonne. Le problème c'est qu'on ne peut pas aujourd'hui y arriver en confiant des compétences aux régions. Les régions c'est la cata ! Les élus n'ont aucune vision et ne font que de la politique. Elles ne sont de toutes manière pas configurée pour autre chose que de distribuer à l'aveugle de l'argent public. Avant de confier de telles compétences il faudrait réformer en profondeur les collectivités locales pour les rendre capable d'être intelligentes. Gros chantier !
PS : Je parle en connaissance de cause. Je pense que vous l'aurez compris.
Malakine
http://horizons.typepad.fr/
Rédigé par : Malakine | 13/12/2006 à 23:42
Merci Malakine pour ce commentaire (le rapport de CB est en lien dans l'itw).
Dans le projet de CB-Energies2007, la réforme territoriale est un axe très fort. Cf http://www.energies2007.com/Main.aspx?numStructure=39602&numRubrique=32807.
Ainsi que http://www.energies2007.com/Main.aspx?numStructure=39602&numRubrique=32806.
Rédigé par : Charles André | 14/12/2006 à 11:59