[Nous accueillons ici la contribution de Jérôme de Nomazy, qui nous livre son sentiment après la publication du dernier document de l'UDF]
Ce week-end, l’activité politique a été florissante et les tentations de
réagir fort nombreuses. Mon choix s’est porté sur la politique de proximité,
ayant eu comme voisin le Conseil National de l’UDF et m’étant procuré le
document «La
France Ensemble», présenté dans la matinée par Pierre Albertini (paraît-il
brillamment).
Pour faire court, dans la globalité, ça va dans le bon sens me semble-t-il. François Bayrou nous livre une analyse réaliste et pertinente de la situation et un projet cohérent, ce qui est un atout par rapport aux idées de l’UMP, pour ne prendre qu’un exemple, ensemble hétérogène de non-idées minimalistes parsemées de quelques réformettes de « rupture ». Il faudra d’ailleurs y revenir afin de comprendre l’expression étonnante de François Fillon : « Franchement, on a bossé ! ».
Quant à elle, l’UDF exprime une vision de la France, de l’Etat, de l’Europe, et des propositions axées sur une réforme de la démocratie et un humanisme notoire. Enfin un programme politique qui vit autour de quelques principes de bases, simples et donc compréhensibles. On est d’accord ou on n’est pas d’accord sur le fond mais c’est déjà un évènement en soit. Reconnu même par Jean-François Kahn, centriste réputé, hier sur Canal+. Tout d’abord, Bayrou considère que la démocratie et l’Etat doivent être réformés en profondeur pour libérer les énergies et les talents ; il propose une 6ème république plus transparente, plus juste, plus responsable, plus proche des citoyens et des entreprises, en particulier les petites, et appelle à une « révolution civique ». Considérant également que l’exclusion sous toutes ses formes (travail, famille, santé, …) est un des maux majeurs dont souffre notre pays, il cherche à lier libération de l’emploi (transfert des charges pesant sur le travail, « Small Business Act ») et solidarité (modernisation du débat social, régionalisation de la santé, service civique de solidarité, fins naturelles des régimes spéciaux). Avant de conclure sur un nouveau traité européen plus politique et démocratique, il insiste sur l’école et l’université (sans parler de régionalisation comme pour la santé, c’est bien dommage) et la recherche (sans évoquer suffisamment la nécessité d’une relation quasi fusionnelle entre recherche, université et tissu économique).
Mais Tout Va Bien n’est pas le site de l’UDF, alors arrêtons là les compliments et entamons la critique car critique s’impose. Une critique constructive sur quelques points sur lesquels la qualité voire la consistance n’était pas au rendez-vous ou non aboutie. En voilà quelques uns… d’autres suivront certainement…
L’Europe et l’Environnement – regroupés ici car ils sont, ensemble, les deux enjeux capitaux de ce début de millénaire : notre capacité à relever ces défis conditionnera notre avenir à court et à moyen terme. Et je crains que des réponses par trop institutionnelles et théoriques, bien que nécessaires, ne génèrent point l’influx salutaire ni aux citoyens, ni aux entreprises, ni à nos partenaires. Un « ministre de haut rang » ou un traité, on l’a vu, ne sont pas facteur d’adhésion ni de transformation de la société. Quels sont les 3 projets européens prioritaires que la France doit pousser et imposer ? Quelles sont les modifications profondes de consommation d’énergie qui permettront la maîtrise de notre stratégie énergétique et qui motiveront les citoyens et les entreprises car ils y trouveront un mieux en terme de qualité de vie ou de création de valeur ?
La réforme de l’Etat – Coté réforme des institutions, de la démocratie, le projet de Bayrou respire bon. On avance. Un point déçoit. Quand je lis « une décentralisation clarifiée qui mette fin au morcellement des compétences et simplifie notre organisation administrative », l’espoir naît. Quand je ne vois aucune réforme claire et ambitieuse sur cette organisation, il retombe comme un soufflet. Alors qu’il ne manque que la conclusion : supprimer l’échelon départemental, diviser le nombre de communes par 8 ou 10 sur base des regroupements existants (et supprimer ces dits regroupements sans légitimité démocratique), et éventuellement rassembler voire redessiner certaines régions. Tout cela en partant d’un principe simple : chaque collectivité doit être capable de fournir les services qui relèvent de sa compétence. Mais on peut comprendre Bayrou qui, tout réformateur qu’il est, reste le président d’un parti politique aux élus locaux très nombreux. Sera-t-il celui qui coupera la branche sur laquelle ses supporters sont assis ?
C’est affaire de méthode. En matière d’environnement ou d’organisation comme
ailleurs, l’Etat doit montrer l’exemple, être le premier de la classe. Question
de principe. Question de méthode. Quand on annonce « l’extinction » des régimes
spéciaux, il serait de bon ton d’annoncer en priorité celui des élus. Quand on
veut réformer les autres, il faut commencer par se réformer soi même. Bayrou
esquisse un vrai changement, mais doit encore démontrer l’essentiel,
c'est-à-dire construire «La
France Ensemble» comme s’il était de la société civile.
Jérôme de Nomazy
Je viens de terminer la lecture du projet de l’UDF. Je le trouve archi décevant. Ok, le diagnostic est indiscutable. Mais aucune vision d’ensemble qui en tire des conclusions. Ce projet, je l’ai lu comme un catalogue de mesures...
Hélas pas le temps de rentrer dans le détail, mais la pseudo-vision qui y est exprimée est encore celle du ni-ni : ni atlantiste, ni conservateur (ce dernier point est discutable...).
Les "remèdes" économiques sentent fortement le déjà vu (oui oui, ça sent !), des propositions archi légères et sans aucune dimension structurelle en matière de recherche (on n’est pas loin du "des moyens, des moyens, des moyens !).
Si le volet institutionnel est intéressant, il me semble inachevé :
- président responsable tout en gardant le PM -avec une argumentation assez convaincante-,ok.
- mandat unique, ok.
- maîtrise par le Parlement de son ordre du jour, plutôt ok... Mais comment garantir au gouvernement le débat des textes nécessaires à sa politique en l’absence de majorité parlementaire ? Et surtout que juste au-dessus, l’UDF arguait en faveur du maintien du PM l’absence de culture de la négociation entre les pouvoirs en France...
- une décentralisation par véritables blocs de compétences, ok...mais l’UDF n’ose pas aller jusqu’à demander l’autonomie fiscale et réclame des "compensations intégrales par l’Etat des transferts de compétences". De qui se moque-t-on, quand on sait précisément que le financement des transferts par dotations maintient la tutelle de Paris ? L’UDF n’ose pas non plus -et c’est bien logique quand on connaît sa composition sociologique- préconiser la suppression d’un niveau territorial...
Si les fondamentaux "philosophiques" de la place de la France dans le monde et dans l’Europe sont évidemment, dans la tradition du parti, intéressants, quasiment rien sur la démocratisation de l’UE par exemple, encore une fois abordée presque uniquement sous son angle institutionnel...
Et, par dessus le marché, ce projet est lamentablement mal écrit.
Je pourrais dire que je suis "déçu, déçu, déçu", mais je n’attendais pas grand chose...
Je trouve le projet d’Energies2007 et Christian Blanc bien plus ambitieux car jouant sur quelques points-clés susceptibles de remettre la France en mouvement. Et là est bien l’essentiel.
Rédigé par : Charles André | 15/11/2006 à 11:41
Bon Charles André je vais t'achter des lunettes centristes... ;-)
Rédigé par : Farid Taha | 18/11/2006 à 20:57